... MAIS ELLE PERDURE, LA FOLIE

photographie: mat jacob

dimanche 15 mars 2015

Un néant brillant...



LE VENT D'APRES
LE VENT D'AVANT

Depuis jamais 
Je sais toujours
Souvenir d'avenir après tout vie révolue
Prévision d'autrefois d'avent tout mouvement
Avant que soit
Le premier mouvement le vent 
Pour quel crime immense inconnu
D'un juge qui n'est que moi-même
Ma condamnation au présent à perpétuité
Eternité
Depuis jamais
Je sais toujours
Prévoir me souvenir du vent qui vient de plus loin que la lune
Et les étoiles
Le vent de bêtes légion
Qui plisse du plus loin que l'humaine illusion de tout l'espace oblong
Le vent de bêtes et de griffes
Qui hurlent dans les caves du ciel
Déchirent des lambeaux de soie noire aux parois supérieures de l'éther
Le vent qui vient du plus loin que tout l'espace plein
Le granit d'un seul grain de granit
Granit sans grains
Le granit plein
Le vent qui vient de plus loin que l'éternelle limite
Où le marbre est perméable au tulle
Et les étoiles alvéoles perméables à l'éther dentelles
Le vent qui n'a jamais dépassé
L'ourlet croquant de mon oreille
Le vent qui n'a jamais pénétré sous mon crâne
Jamais fait résonner les grottes de mes tempes
Le vent qui secoue l'étendue onduleuse de tout
Mais le vent qui ne peut secouer moi le vide
Le trou d'absence dans le monde
Le défaut du cristal le crachat de l'émeraude
l'entonnoir le trou


Espace que détient mon corps statufié dans l'espace
Mon corps est le seul lieu où je ne me sais pas
Le seul lieu où je ne sois pas
Moi qui suit le vent d'avant tout mouvement
Le vent vivant après toute vie révolue
Le vent qui vient du plus loin que la forme oculaire de l'infini de l'homme
Limite de souffrance la peau la seule opacité
Nuit de tambour increvable
Que les volcans du vent fassent éclater mon crâne
Retournez-moi comme un gant
Dévaginez-moi jetez-moi nu tout vif écorché à l'amour souterrain de l'ombre de l'envers du monde


Arrachez la viande de mes joues
Pour que je voie enfin mon rire de mort

extrait de Le Vide Et Le Vent, pp. 91/92





JE VEUX ETRE CONFONDU...
OU
LA HALTE DU PROPHETE

à Claude Sernet

Vous vous trompez je ne suis pas celui qui monte
Je suis l'autre toujours celui qu'on attend pas
Ma face sous le masque rouge gloire et honte
Tourne au vent que je veux pour seule guide à mes pas
J'assumerai l'immobilité des statues
Sous la colère de l'orage aux gestes tors
Qui rompt au sol vos fronts ruines abattues
Mais me laisse debout n'ayant raison ni tort
Qu'espérez-vous de moi seul droit dans la tourmente
Terriblement absent roide et froid sans sommeil
Pour parler aux vieux morts il faut trouver la fente 
Par où filtre un rayon noir de l'autre soleil
Et si je tombe avant le soir sur la grand'route
La face contre terre et les deux bras en croix
Du fond de tout l'influx de force sourd en moi
Je me redresserai pour la nuit des déroutes
Et je remonterai vers vous comme la voix
Des grandes eaux hurlant sous les nocturnes voûtes
Avant l'heure et le signe advenus laissez-moi
Laissez-moi seul vous tous qui niez le prophète
Trabsmuant toute vie en un retournement
Du sens illuminé par d'immortels tourments
Laissez-moi dans le vide atroce de ma tête
Confondant confondu confondu confondant 

extrait de Le Miroir Noir, pp.102/103

in  La Vie l'Amour la Mort le Vide et le Vent, Roger Gilbert-Lecomte (Poësie/Gallimard)

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