Pas un mot, pas un geste.
Rien.
Pas un souffle, pas un effleurement,
ni même une très légère courbure
des lèvres et des doigts,
je ne demande rien.
Je donne tout. La vie d'avant et celle
d'après,
et celles d'après. Les événements
qui surviendront,
les artifices malades
et les joies minuscules. Et avec cela
les choses qui n'arriveront jamais, les colères
à toute vitesse, les mauvais moments,
la honte de ne pas avoir été ce que j'aurais
dû être.
Je donne tout.
Je ne demande rien.
Pas un baiser tordu
de crainte ou de timidité. Pas une larme sincère
et les aveux qui viennent les uns après les autres,
bien rangés dans leurs sanglots.
Je ne mets plus de point d'interrogation à la fin
de mes phrases,
d'ailleurs, je parle de moins en moins.
J'ai trop peur des lumières vives,
je crains le regard
bête
et la pitié sans élégance qu'oblige un refus.
Je ne demande rien.
Je donne tout.
La maigreur des jours sans faim.
Les soirs de fêtes et les assiettes pleines.
L'argent qui fut gagné facilement, et dépensé
tout aussi facilement.
Les histoires incroyables
qui font du monde réel un univers moins vraisemblable
que ceux de nos livres.
Je donne les chansons,
les poëmes, avec mes mains à l'intérieur
et mes jambes tendues lancées dans la course.
Je donne tout.
En cachette, je garde dans mon coeur
ton coeur, dans mon ventre ton ventre,
dans mes yeux tes paupières,
en silence, je garde sur ma langue
ta langue, dans mes cheveux les tiens,
dans ma bouche ta bouche.
Ecoute:
je donne tout, je ne demande rien.
Les Ronces, pp107/108, Cécile Coulon, Le Castor Astral
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