Puis cet il, cet oeil, conjecture. Se creuse: se vide et se laisse devenir ample. S'ouvre: laisse percer le jour. Se laisse toucher. Alors, illuminé, peau vide pourtant encore, sens unique sans chair et sans cicatrice, bref sans histoire, l'oeil se fend: fend sa lumière et son creux. Et fait jaillir les autres sens. Alors: le temps !
Ainsi, vue, lumière, temps, espace, naissent d'un creusement infini, d'une courbure informe, mais redoublée, donc de deux infinis heurtés, écartelés jusqu'à s'enrouler, devenir point, cercle, boule - premier volume. Depuis le globe de l'oeil,le monde immense apparaît.*
L'épreuve de la peinture que Max Loreau fait subir à la vision philosophique culmine ici dans le mythe. Mais qu'est-ce que ce mythe ? Le récit de l'origine d'où s'engendre le phénomène - le corps de la vue ? A condition d'être ouverture de la langue: entre Platon et Hölderlin, la fiction du mythe prend la double force d'une écriture poëtique et philosophique.
L'origine de l'oeil, de la peinture, a fortiori de la théorie, se trace dans la langue du mythe: énigmes.
* Extrait de Vue d'intérieur (Le drame de la naissance du globe), Max Loreau, éditions Carte Blanche, Paris,1985
Eric Clémens, in TeXTes, anthologie, éditions du CEP, p.87, 2020. Initialement paru dans la revue TXT n°20, La peinture fait écrire,1986
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