samedi 26 février 2022

Mouvance




 
 
 








 

Modèle: Queen Bao 
Photographe: Frédérique Pottier 

En cette admirable série, la beauté vient du fait que Pottier capture littéralement un certain regard de Queen Bao, qui pourrait rappeler, peut-être celui, absolument déchirant, de Falconetti pour la Jeanne d'Arc de Dreyer... Regard qui nous transperce, même lorsqu'il semble absent. 
Je ne puis que conseiller d'aller découvrir le site d'icelle, et ses différentes galeries d'où semble émerger, parfois, le gars Molinier... 



Rien.

 à l'épaule nue périple fragile côtes embrassées coercition floue tant d'images sourdes spirale à la nuit invective écarlate parmi les précipices idéelle bastille regards torves élégance lasse un bouleversement l'éternité qui sommes-nous ?

mercredi 23 février 2022

Des Russes...


 "Les Russes, on se demande bien ce qui pourrait encore les atteindre"

Sergio & Hyvernaud...

Vouloir mourir

 Puisque tu le demandes, souvent je ne m'en souviens pas.
 
 Vêtue je marche, vierge de ce voyage. 
 Puis le désir presque innommable revient. 

 Même là, je n'ai rien contre la vie. 
 Je connais bien des brins d'herbe dont tu parles, 
 les meubles que tu as disposés au soleil. 

 Mais les suicidés ont leur langue à eux. 
 Comme les menuisiers, ils veulent savoir quels outils
 Ils ne demandent jamais pourquoi construire

 Par deux fois je me suis révélée si simplement, 
 j'ai possédé l'ennemi, mangé l'ennemi, 
 ai fait miens son art et sa magie. 

 Ainsi, lourde et pensive, 
 plus chaude que l'huile ou l'eau, 
 je me suis reposée, bavant devant l'orifice. 

 Je n'ai pas pensé à mon corps sous la pointe de l'aiguille. 
 Même la cornée et ce qui restait d'urine avaient disparu. 
 Les suicidés ont déjà trahi le corps. 

 Morts-nés, ils ne s'éteignent pas toujours, 
 mais éblouis, ils ne peuvent oublier une drogue si douce 
 qui attirerait et ferait sourire jusqu'aux enfants. 

 Fourrer toute cette vie sous ta langue ! 
 cela, en soi, devient une passion. 
 La mort est un os triste; meurtri, dirais-tu, 

 elle m'attend pourtant, année après année, 
 pour défaire si délicatement une vieille blessure, 
 débarrasser mon souffle de sa prison mauvaise. 

 Là, en funambules, les suicidés se croisent parfois, 
 rageant contre le fruit, une lune gonflée, 
 délaissant le pain qu'ils ont pris pour un baiser, 

 laissant le livre ouvert par inadvertance, 
 une phrase en suspens, le téléphone décroché 
 et l'amour, peu importe lequel, une infection. 


  Vouloir mourir extrait de Tu vis ou tu meurs Anne Sexton traduction Sabine Huynh, in Anne Sexton, Tu vie ou tu Meurs, Oeuvres poëtiques (1960-1969) pp 280/281, des femmes éditions.

Spectrale

 Sombre encore après la nuit... Seuil déchiré cette ombre. Acharnement silence. Coutelas en l'abîme. Désir désordre à la pénombre...  Effraction tumulte. Bourrasque quelque. Tranchant d'hier lame demain. Confusion même, erratique constance... Délicatesse encore, défiance nombre. Trouble à l'abord, limite ignorance... 

mardi 22 février 2022

Come to me


 PJ Harvey & Mark Lanegan
So long, bastard... 

samedi 19 février 2022

Histoire de l'oeil/La part du feu

 Il faut en finir. 
 Frapper en plein visage, en plein centre de l'âme, au coeur de l'oeil - du seul qui compte (mon oeil droit, de naissance, est un miroir sans tain.) Frapper au plus visible: en plein noir de la pupille dilatée. Et pour ne pas rater son coup, devant la glace grossissante... 
 C'est presque fait déjà. En somme, il ne reste plus que le bout crispé du doigt, la gueule ronde prête à hurler quand bondira la balle - et le but, la proie, la peur, le cercle d'ombre s'élargissant... 
 Pour la première fois, les belles petites images convexes, les enluminures de l'oeil, les miniatures innocentes du monde, les faibles représentants de l'espace, les reflets, ont cessé d'être. Ce que je vois là-dedans: cet abominable trou qui saigne, vient du temps, de moi, de l'intérieur. 
 Une main retombe, molle. 
 L'intensité, la honte, pouvaient suffire: s'il n'est pas mort, il n'en vaut guère mieux. L'oeil droit dédaigné, rageur, jette son encre sympathique - et l'oeil gauche renonçant à soi-même, à la pourpre, aux prodiges, n'ose enfin se regarder. 
(p.424) 

 Sitôt connus, tour à tour bêtes féroces, ils se déclarent contre mon trésor le plus précieux. Contre l'unique innombrable. Contre mon indéfinissable raison d'être. Je leur fais pourtant la partie belle. Mais leur soif de proie ne peut être apaisée; mais leur faim de ma chair est insatiable. Ils n'y mettent pas la moindre méchanceté. C'est seulement trop fort pour moi. 

 Je les sens vite venir. Un geste, un mot, un rien - la plupart du temps indirect - me les décèle. Ils se gorgent de mes larmes. Ils ne me laissent pas même de quoi souffrir. Je n'ai le coeur de pleurer qu'après les avoir fuis. 

 Chers Inconnus, gardez bien vos distances: Je n'ai que vous au monde. 
 "Et moi ? Moi?..." crie quelqu'un: moi-même. 
 Mon beau devenir, ce renfort inespéré m'arrive. Présent déjà passé, toi qui m'échappes, encore un instant de répit... 
 Pourvu qu'il ne soit pas trop tard. 
(p.432) 

 Extraits de Ecrits,  Claude Cahun, Jean-Michel Place éditeur

vendredi 18 février 2022

Jaculation (Infinitive - 19)

Fouir ouïr jouir 
Spectacle élan 
Flot de basses 
Alternatives 
Craindre feindre perdre 
Un continent 
Parmi ses années 
Déceptives 
Entendre fendre méprendre 
Une insomnie 
A cet écart 
Jaculation.

jeudi 17 février 2022

Joycienne prière

Encore! 
Viens, donne, cède-moi toute ta force! 
De loin un mot murmure tout bas au cerveau brisé 
Son calme cruel, misérable soumission, 
Adoucissant son craintif respect comme à l'âme prédestinée. 
Cesse, amour silencieux! Mon destin! 

Aveugle-moi de tes proches ténèbres, ô aie pitié, ennemie bien-aimée de ma volonté!
Je n'ose résister à ce froid contact que je redoute.
Retire de moi encore 
Ma vie lente! Penche-toi plus profondément vers moi, tête menaçante, 
Fière de ma chute, le prenant en pitié et te souvenant de 
Celui qui est, celui qui fut! 

Encore! 
Ensemble, repliés dans la nuit, ils gisaient à terre. J'entends 
Au loin les mots murmurer tout bas à mon cerveau brisé. 
Viens! Je cède. Penche-toi plus profondément sur moi! Je suis là. 
Dominatrice, ne me quitte pas! Seule joie, seule angoisse, 
Prends-moi, sauve-moi, apaise-moi, ô épargne-moi! 


Une prière, James Joyce, extrait de Musique de chambre et autres poëmes, in "Je ne voudrais la manquer pour rien au monde, miss livrie de la nerthe.", p.111, La Nerthe, traduction Philippe Blanchon

samedi 12 février 2022

Un horizon.

 Rien qu'expiration crasse à l'oraison lignes d'hier un abandon sommaire humain trop humain encore cavalcades parmi les ombres solitude spectre ignorance gouffre bloc amène d'abîme après les ans quelle scansion alternative flamme fièvre à l'horizon existence errements delà de la volte face à l'ennui inénarrable inédite escapade à l'épuisement une distance.

vendredi 11 février 2022

J'avais un corps


J'avais un corps 
L'aimais le désirais l'étreignais 
Il grandissait, embellissait 
Je baisais ma bouche 
Plongeais mon regard dans mes yeux 
Le regard de mes bruns dans les verts 
Mon propre corps n'était que le révélateur du sien 
Né après moi 
L'avenir courait dans les veines 
Je me suis fermé les yeux 
Porté en terre Pleuré 
Jamais je ne ressusciterai

extrait de Entre le marteau et l'écume p.129 (Le Chemin de Fer) Béatrix Beck

jeudi 10 février 2022

The drumming man


 Pas de grand groupe sans excellent batteur, pas de Clash sans Topper 
Photographe inconnu

samedi 5 février 2022

Play blessures

 L'insomnie diverge - ailleurs scansion - on ne tient pas longtemps - l'amnésie s'errance - perte de sens et de vitesse - cela fatigue - tellement rien au précipice - des mots - la fuite - toujours plus, par le fond - à perdre son temps on oublie - rien de plus que cela - redécouvrir amène la nuit - et ses entrelacs -  ainsi que ce présent qui s'épuise - déchirure limite - play blessures - secondes débordent - dans le creux encore - répit, expérience - immanence grave - à toute heure événement -  tentation d'écart - cette ombre, oraison