mardi 30 juin 2020

Le monde et cætera

 Danse, danse mon amour, viens crever ta chair sur leurs fils barbelés, déposer tes nerfs dans leurs gueules d'anges morts, obscurcir tes orgasmes, ravager ton squelette, viens inonder tes yeux de leurs infinis crachats.
 Viens boire cette eau vieille comme le monde, noire comme la merde, laisse-la te prendre par l'intérieur, te faire vomir jusqu'au sang, et quand tu penseras avoir fini de régurgiter tout ce rouge tu verras de ta gorge jaillir dans un dernier spasme une lave très noire, très ancienne.
 Et tu es vide maintenant. Vide.Vide.Vide.
 Et tes cris ne font plus aucun bruit.
 Et tu es morte et je le chante à tue-tête. Tu es morte. Morte. Morte.
 Et le monde s'en fout. Et tes putains de sorciers ont tous disparu en même temps, les traîtres.
 Tu devais t'y attendre.
 Il aurait fallu foutre le feu à tout ce qui ne brûle pas. Incendier les blocs de glaces autour de nous.
 Cela t'aurait sauvé ma Lou, n'est-ce pas ?
 Tu as rêvé de ces corps que l'on aurait balancé dans les flammes, tu as rêvé de danser dans leurs cendres, tracer des lignes dans cette poussière qui ne signifie plus rien. Tu as rêvé dans la fièvre avec le coeur qui tape, le sang qui grogne dans les veines, la peau qui démange jusqu'au cri.
 Je sais tout ça. Et je te revois marcher comme une demeurée à travers la ville, chercher parmi les hommes et les ombres n'importe quoi qui puisse faire mal.


 Extrait de A l'aurore, l'insolence, Editions du Cygne, pp 48/49, Sara Bourre

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