Le mot ronce, dis-tu ? Je me souviens
De ces barques échouées dans le varech
Qui traînent les enfants les matins d'été
Avec des cris de joie dans les flaques noires
Car il en est, vois-tu, où demeure la trace
D'un feu qui y brûla à l'avant du monde
- Et sur le bois noirci, où le temps dépose
Le sel qui semble un signe mais s'efface,
Tu aimeras toi aussi l'eau qui brille.
Du feu qui va en mer la flamme est brève,
Mais quand elle s'éteint contre la vague,
Il y a des irisations dans la fumée.
Le mot ronce est semblable à ce bois qui sombre.
Et poësie, si ce mot est dicible,
N'est-ce pas de savoir, là où l'étoile
Parut conduire mais pour rien sinon la mort,
Aimer cette lumière encore ? Aimer ouvrir
L'amande de l'absente dans la parole ?
Le mot ronce, dis-tu, extrait de Ce qui fut sans lumière (poësie/gallimard) p.42 Yves Bonnefoy
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