vendredi 12 décembre 2014

Repose-toi dans tes blessures.



TENIR DEBOUT, dans l'ombre
du stigmate des blessures en l'air.

Tenir-debout-pour-personne-et-pour-rien.
Non-reconnu,
pour toi
seul.

Avec tout ce qui a ici de l'espace,
et même sans
parole.

(p.33)


SOIS AVEUGLE dès aujourd'hui :
l'éternité aussi est pleine d'yeux -
s'y
noie ce qui a aidé les images à passer
par-dessus le chemin où elles venaient,
s'y
éteint ce qui, toi aussi, t'emporta
du langage, d'un geste
que tu laissas advenir comme
la danse de deux mots de simple
automne, de soie et de néant.

(p.73)

NOIRS
comme la blessure de souvenir,
les yeux fouillent et te cherchent
dans le pays de couronne mordu
à blanc par dents de coeur,
qui est toujours notre lit :

c'est par ce puits creusé que tu dois venir -
tu viens.

Dans le sens
de semence
la mer t'étoile, au plus intime, à jamais.

Donner des noms a une fin,
sur toi je jette mon destin.

(p.93)


CÀ ET LÀ BOUSCULEE
la Lumière-perpétuelle, jaune limon,
derrière
des têtes de planètes.

Des regards
inventés, cicatrices
de vue,
entaillées dans le vaisseau spatial,
mendient des bouches
terrestres.

(p.121)


GRANDE VOÛTE INCANDESCENTE
avec
l'essaim d'astres noirs qui s'affouille
une voie de sortie, de départ :

au front caillou d'un bélier
je marque au feu cette image, entre
les cornes, dedans,
dans le chant des circonvolutions, enfle la
moelle des
mers de coeur figées.

Contre
quoi
ne fonce-t-il pas ?

Le monde est parti, il faut que je te porte.

(p.167)


UNE FOIS,
je l'ai entendu,
il lavait le monde,
non vu, à longueur de nuit,
vraiment.

Un et Infini,
anéantis,
disaient Je.

Lumière fut. Sauvetage.

(p.183)


in Renverse du souffle (Points/Seuil), Paul Celan , traduction Jean-Pierre Lefebvre 



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire